Sommaire
- Le Festival de Cornouaille 2025 : triomphe, déceptions… et nouvelles vérités au cœur de Quimper
- Un retour triomphal… mais pas pour tous
- …mais une saveur mitigée pour certains
- Des regrets qui questionnent l’organisation et l’expérience client
- Pourquoi cette fracture dans les résultats ? Un festival devenu grand public, mais a-t-il conservé son âme économique ?
- Conclusion : un vent de renouveau, mais encore à ajuster pour que tous gagnent
- Les prochaines étapes à venir pour le Cornouaille et les commerçants de Quimper
Le Festival de Cornouaille 2025 : triomphe, déceptions… et nouvelles vérités au cœur de Quimper
Chaque été, la ville de Quimper vit à l’heure de Cornouaille, ce festival breton historique devenu un grand rendez-vous mêlant danses, musiques, et… beaucoup d’attentes économiques pour ses commerçants. Mais derrière l’effervescence du folklore s’élèvent cette année des avis tranchés qui racontent une autre histoire, celle d’un festival qui a changé de visage depuis son retour au centre-ville.
Vous connaissez ce paradoxe si breton : la fête bat son plein, les rues vibrent, les héros costumés défilent, et pourtant certains finissent par se demander si ce port d’attachement à l’esprit du Cornouaille est le bon, surtout quand il s’agit de chiffres de fréquentation et de réussite commerciale.
Un retour triomphal… mais pas pour tous
Imaginez ceci : Jérôme Corvez, le nouveau propriétaire de la crêperie du Quartier, lance pour la première fois depuis des mois l’ouverture en continu d’un samedi et d’un dimanche, et là, c’est l’explosion : 275 couverts servis le samedi – contre 140 habituellement. Un signal fort qu’autour du festival, tout peut encore exploser dans le bon sens !
De son côté, Benoît Gautier, derrière sa crêperie traditionnelle de la place au Beurre, salue l’ambiance : « Le Cornouaille, c’est toujours un moment ultra-cool. » Avec la salle remplie deux midi de suite, les bons résultats opèrent, y compris après les heures de repas.
Ne nous oublions pas Le Steir, ce bar emblématique de la place Terre-au-Duc où la fréquentation a littéralement doublé. Son patron Sébastien Esnault lâche même : « Où est-ce que je signe à nouveau ? » Ce retour du festival en cœur de ville ne lui donne qu’une seule envie : revivre l’expérience sans limite. Mieux encore, l’équipe du « Finistère » tourne l’ironie en admettant que « les 4 jours ont été désastreux… de bonheur ! »
…mais une saveur mitigée pour certains
Cependant, la liesse n’est pas générale. Car répondre à la simple question « est-ce que le festival s’est bien passé cette année ? » revient à fréquenter des visages réservés à la mi-ombre. La douceur du commerce semble parfois altérée par un vent incertain, insufflant une frilosité imprévisible.
Déborah Barreau, du Pokawa sur la place Terre-au-Duc, évoque une fréquentation inférieure de 10 à 15 % par rapport à 2024, chiffre qui peut sembler modéré mais qui suffit à peser lourd dans la balance économique d’un restaurant.
En face de ces bilans chiffrés, Corinne Frabolot, de l’Épicerie fine de Quimper, nourrit un sentiment étrange : « Il y a eu du monde, certes, mais pas d’achats significatifs. Les festivaliers sont venus flâner, profiter du plaisir du spectacle plutôt que de faire chauffer leur carte bancaire. »
Ajoutez à cela les hésitations d’une crêperie voisine, qui a vu passer plus de clients, oui, mais sans que cela se traduise en grosses ventes. La passion seule ne suffit plus, car même à l’heure des traditionnels festoù-noz et sonneurs, le portefeuille semble plus sage.
Nicolas Lohéac, président de l’association commerciale Les Vitrines de Quimper, porte une analyse équilibrée : si tous les commerces ne sont pas sortis grandis du festival, le retour dans le centre-ville reste une bonne chose. C’est une dynamique que rien ne peut nier, et qui s’enracine peu à peu dans la ville.
Des regrets qui questionnent l’organisation et l’expérience client
Mais on ne discute pas avec les émotions vives des commerces de prêt-à-porter, parfois désemparés par le souffle festivalier. Sylvaine, rue Elie-Fréron, est même catégorique :
« Pourri… on a mieux travaillé avant le festival. »
De quoi faire redoubler d’attention sur l’agencement des villes lors d’événements festifs majeurs. Françoise Tranchant de Cado-cuir ne cache pas son amertume : coincée derrière un stand vendant de la friture, envahie par des odeurs peu compatibles avec une boutique de cuir, elle erre davantage « comme une invitée involontaire ». Quand la fête repousse certains commerçants en marge, la question de répartition des espaces se pose avec insistance.
Côté restauration aussi, centres de la fête et périphéries ressentent une injustice. Plusieurs patrons regrettent par exemple que le défilé ne traverse plus certaines places prestigieuses, occasion unique pour eux d’attirer les passants. Ou ce moment disparu des soirées dédiées aux vieux métiers, remplacées par des terrasses trop nombreuses, bruyant autour et éloignant les invités.
Ce goût d’inachevé, cette impression d’être oubliés sur la touche renvoient aux paradoxes du festival. Philippe Doulou, tout en appréciant la forme actuelle, n’en fait pas moins une analyse contrastée.
Pourquoi cette fracture dans les résultats ? Un festival devenu grand public, mais a-t-il conservé son âme économique ?
Le phénomène Cornouaille est à l’image des transformations urbaines actuelles : il attire beaucoup – inévitablement – de « touristes » festivaliers qui vivent l’événement pour la sensation plus que l’achat, la danse plus que le diner peinard ou le shopping engagé.
Le retour du festival en centre-ville, pensé comme un souffle pour le commerce local, constitue une opportunité mais aussi un défi. Attirer la foule est une réussite, créer une foule acheteuse en reste une autre.
En vérité, on découvre dans ce festival plus que jamais la double verticalité des enjeux : augmenter le trafic pour ensuite mieux canaliser les attentes ; localiser l’intérêt tant pour l’expérience culturelle que pour le bénéfice économique.
Conclusion : un vent de renouveau, mais encore à ajuster pour que tous gagnent
À vous, cher lecteur et peut-être futur visiteur de Quimper, je parle aussi. Ces récits de commerçants, de patrons de bars ou crêperies vous disent une chose très simple : l’âme du Cornouaille est vivante, mais elle doit s’appuyer sur un projet économique renouvelé et partagé par tous pour que la magie sociale rime avec le succès matériel.
En somme, c’est le retour au cœur coloré de la ville qui séduit, mais qu’il faut renforcer pour rendre la foire aussi généreuse pour les commerçants traditionnels que pour le public en quête d’émotions authentiques.
Les prochaines étapes à venir pour le Cornouaille et les commerçants de Quimper
- Rééquilibrer et fluidifier l’espace pour que l’ensemble des commerces, qu’ils soient boutiques, restaurants ou bars, bénéficient pleinement de la montée en puissance du festival.
- Multiplier les animations ciblées dans toutes les zones, garnissant les lieux hors des parcours traditionnels du défilé, histoire d’attirer les visiteurs jusque dans les zones plus résidentielles.
- Renforcer la communication auprès des visiteurs sur le commerce local pour encourager un acte d’achat et pas seulement un « passage agréablement passif ».
- Maintenir une collaboration étroite entre organisateurs, commerçants et ville pour ajuster en temps réel l’événement aux attentes et expériences vécues.
- Valoriser l’artisanat et les spécialités locales par des stands dédiés où les commerçants de quartier pourraient exposer, mêlant à la fois tradition bretonne et innovation.
Alors que vous planifiez votre prochaine escapade culturelle ou que vous soutenez localement une économie en quête d’équilibre, n’oubliez pas que derrière le folklore, il y a des familles, des emplois, des passions, dépendants de l’effervescence du Cornouaille. Pour que le cœur battant de Quimper continue à vibrer, le festival doit devenir un vrai moteur d’accompagnement de toutes les forces vives de la ville.
N’est-ce pas là la plus belle promesse de la Bretagne ?